Fév 06, 2021 Articles publiés

Le Coran et la question du pluralisme religieux


Prémisse métaphysique : Shaykh Arif Abdul Hussain a construit l’analyse suivante à partir de la doctrine existentialiste de Mollā Sadrā Shīrazī sur le mouvement intra-substantiel (ḥarakāt al-jawhariyā) [1] qui considère que toutes les entités sont dans un état de mouvement constant et se réalisent elles-mêmes de façon évolutive. Le mouvement intra-substantiel est caractérisé par deux propriétés : une propriété de négation selon laquelle toute chose cherche à se libérer et la seconde propriété qui est positive, selon laquelle toute chose connaît son auto-réalisation. Quand cette doctrine est appliquée aux communautés humaines, la recherche de la complétude morale et spirituelle suivent les mêmes tendances, aussi bien à l’échelle individuelle que collective [2].


Source : http://www.shaykharif.com/blog/quran-religious-pluralism


1. L’essence et la forme

La religion, traduit par « dīn » correspond aux enseignements qui forment la base d’une représentation de la vie et d’un mode de vie. Principalement, le Coran souligne que le « dīn » (ici, religion) est soit celui d’Allah ou autre chose que le « dīn » d’Allah. Tous les enseignements religieux (ici, du dīn) s’appuient sur deux composantes élémentaires : l’essence et la forme.   

1.1.  Qu’est-ce que l’essence ?

Nous appelons essence, une caractéristique saillante du dīn, tandis que la forme est une caractéristique contextuelle du dīn. Au sein du dīn d’Allah, l’essence englobe d’abord les enseignements théologiques tels que : comprendre l’origine et le but de l’existence humaine, la relation de l’être humain à Dieu, le rôle de Dieu dans la vie de l’être humain, les vertus humaines et les normes morales humaines. L’essence est transmise grâce aux révélations et aux enseignements des prophètes et des saints. Shaykh Arif Abdul Hussain défend le postulat suivant lequel l’essence est intuitivement accessible et saisissable à partir de la base même de la condition humaine.

À partir de là, nous pouvons affirmer que l’essence est partagée indifféremment par toute l’humanité, et en particulier par la foi monothéiste, et plus spécifiquement par les religions abrahamiques qui, d’une façon ou d’une autre, s’appuient sur la théocentricité et la spiritualité morale. Le Coran appelle ce dīn d’Allah islām [3], qui signifie se remettre à la volonté de Dieu et aux enseignements décrétés par Dieu, lesquels selon toute vraisemblance, sont cohérents avec l’intuition humaine et ont été conçus d’une manière à susciter chez l’être humain les plus belles vertus humaines, sources du salut humain. Ainsi, islām est constitué de deux composantes saillantes, celle de l’essence et celle de la forme contextuelle ; ceux qui suivent l’islām sont désignés par le terme muslimūn dans le Coran.

Les versets ci-dessous du Coran renvoient aux notions de islām et de muslimūn. D’autres versets relatifs au caractère universel des termes islām, muslimūn, et dīn sont : 3:64, 3:67, 27:44, 29:46 et 29:46.

2:133 Étiez-vous présents, lorsque la mort se présenta à Jacob et qu’il dit à ses enfants : « Qu’allez-vous adorer après moi ? » Ils dirent : « Nous adorons ton Dieu, le Dieu de tes pères : Abraham, Ismaël et Isaac, Dieu unique ! et nous nous soumettons (muslimūna) à Lui ».

3:52 Jésus dit, après avoir constaté leur incrédulité : « Qui sont mes auxiliaires dans la voie de Dieu ? » Les apôtres dirent : « Nous sommes les auxiliaires de Dieu ; nous croyons en Dieu, sois témoin de notre soumission (muslimūna). »

3:84 Dis : « Nous croyons en Dieu, à ce qui nous a été révélé, à ce qui a été révélé à Abraham, à Ismaël, à Isaac, à Jacob et aux tribus, à ce qui a été donné à Moïse, à Jésus, aux prophètes de la part de leur Seigneur. Nous n’avons pas de préférences pour l’un d’entre eux : nous sommes soumis (muslimūna) à Dieu. »

3:85 Le culte de celui qui cherche une religion en dehors de la soumission (islām) n’est pas accepté. Cet homme sera, dans la vie future, au nombre de ceux qui ont tout perdu. 

42:13 Il a établi pour vous, en fait d’obligations religieuses (dīn), ce qu’il avait prescrit à Noé, ce que nous te révélons et ce que nous avions prescrit à Abraham, à Moïse et à Jésus (…).

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

1.2. Qu’est-ce que la forme ?

La forme donne de la matière à l’essence de la religion dans différents contextes donnés. Elle fournit une structure sur la manière de se soumettre à Dieu, de vivre une vie sainte et vertueuse. Le Coran appelle l’ensemble de ces formes la sharī`āt. Au sens large du terme, la sharī`āt peut faire l’objet d’un usage synonyme à celui de dīn d’Allah et dans un sens plus restreint, elle fait référence à l’aspect formel de dīn. La sharī`āt en tant qu’aspect formel est subdivisée en deux partie : les règles (aḥkām) relatives aux dévotions qui constituent les marqueurs d’identité propres à chaque religion et les règles relatives aux interactions humaines. Les règles correspondant aux dévotions (ṣalāt, ṣawm, ḥajj) sont différentes dans chaque religion et peuvent changer pour s’ajuster à différents contextes.

Les versets ci-dessous du Coran renvoient au caractère changeant des formes.

2:148 Il y a pour chacun, une direction (wijhatun) vers laquelle il se tourne. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions. Dieu marche avec vous tous, où que vous soyez. Dieu est puissant sur toute chose.

5:48 (…) Nous avons donné, à chacun d’entre eux, une règle (shir`atan) et une Loi (minhājan). Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions (…).

22:67 Nous avons institué un rite (mansakan) pour chaque communauté ; ses membres l’observent. Qu’ils ne discutent donc pas avec toi l’ordre reçu ! Invoque ton Seigneur ! Tu es sur une voie droite.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

Shaykh Arif Abdul Hussain apporte une clarification sur les règles relatives aux consommables et à la décence et plaide pour se conformer à celles-ci de manière stricte, au sens où elles ne peuvent pas changer pour la communauté musulmane. Le changement de forme n’est pas seulement évident à travers les sharī`āt-es successives révélées par Dieu, mais aussi par un processus d’abrogation inscrit dans le Coran. Malgré la variation temporelle de la forme des différentes règles, l’essence spirituelle et morale de chaque règle est préservée et rendue plus raffinée.

Un exemple explicite d’une règle qui fut reformulée dans l’histoire religieuse est l’abandon de la lapidation, c’est-à-dire donner la mort à une personne à coup de pierres, qui était en vigueur dans la loi juive, mais qui est absente du Coran [4]. L’autre exemple est celui du jeûne à travers différentes religions ou encore les règles relatives aux consommables qui ont évolué du Judaïsme à l’Islam. Aujourd’hui, il existe certains domaines sujets à des divergences où la compréhension de l’essence entre en conflit avec les formes prescrites dans le Coran comme les règles autorisant l’esclavage (2:221), de possession des esclaves (malakat aymānukum, 4:36), du ratio deux femmes pour un homme dans un témoignage (2:282).  Ces règles étaient acceptables au 7ème siècle de l’Arabie, car elles avaient tendance à améliorer les pratiques déjà existantes à l’époque, mais aujourd’hui nous vivons dans un contexte qui est radicalement différent et ces règles sont critiquables.

Prenons l’exemple du verset (2:282) du Coran relatif au ratio deux femmes pour un homme dans un témoignage. L’essence de cette règle concernait avant tout la préservation de la fidélité du témoignage : « (…) si l’une des deux femmes se trompe, l’autre lui rappellera ce qu’elle aura oublié ». Au 7ème siècle, en Arabie, les femmes n’étaient pas éduquées et ne participaient pas à la sphère publique de la société comparées aux hommes qui avaient un rôle à jouer dans les transactions et l’établissement des contrats financiers, raison pour laquelle leur témoignage était équivalent à la moitié de celui d’un homme.

À notre époque, les barrières éducatives et les contraintes liées au travail de la femme ont été supprimées, et dans la plupart des pays du monde les femmes sont éduquées et aussi compétentes que les hommes, ce qui invalide la nécessité du ratio deux femmes pour un homme. Afin de normaliser l’essence d’un témoignage fidèle, la forme de cette règle doit être considérée comme non-pertinente, tandis que la condition coranique de présenter deux témoins demeure valable : « (…) Demander le témoignage de deux témoins (…) ». De plus, suivre une forme archaïque dans un contexte qui a changé pourrait être considéré comme contre-productif, surtout dans des sociétés où l’éducation de la femme progresse, où les droits de la femme évoluent, où leurs contributions dans la sphère publique sont importantes, et être considéré comme un obstacle à la pleine réalisation et au développement de l’être humain.              

1.3. L’importance du contexte

Chaque prophète a prêché l’essence du dīn islām à sa communauté. Et en fonction du contexte dans lequel évoluait la communauté, différentes règles ou formes véhiculant l’essence ont été prescrites. Le contexte humain changera indéfiniment et les règles devront être reformulées pour matérialiser l’essence qu’elles sont censées transmettre. Avec l’apparition de chaque nouveau prophète et chaque nouvelle écriture, l’essence fut rétablie et de nouvelles règles appropriées au contexte changeant furent prescrites. Quinze siècles après le décès du Prophète Muḥammad, de nombreuses règles coraniques relatives aux interactions sociales et humaines ne sont plus adaptées au contexte contemporain. 

Les versets ci-dessous du Coran témoignent du caractère changeant des formes en fonction du contexte.

2:106 Dès que nous abrogeons un verset ou dès que nous le faisons oublier, nous le remplaçons par un autre, meilleur ou semblable. Ne sais-tu pas que Dieu est puissant sur toute chose ?

5:48 (…) Nous avons donné, à chacun d’entre eux, une règle (shir`atan) et une Loi (minhājan). Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions (…).

22:67 Nous avons institué un rite (mansakan) pour chaque communauté ; ses membres l’observent. Qu’ils ne discutent donc pas avec toi l’ordre reçu ! Invoque ton Seigneur ! Tu es sur une voie droite.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

Un exemple de preuves non-coraniques sont l’existence de récits divergents sur les règles du ajj relatives à la zone du maāf. L’Imām Bāqir est d’avis qu’elle est comprise entre le rukn (ka`bā) et le maqām ibrāhīm, alors que l’Imām Ṣādiq a affirmé que cette zone va au-delà du maqām ibrāhīm, sans doute en raison du nombre croissant de pèlerins [5].      

2. La diversité : fonctionnelle et marque de la création

Shaykh Arif Abdul Hussain soutient qu’au sein du cadre existentialiste, il n’y a rien mis à part l’individualité laquelle est productrice de variété, de diversité et de relativité. Ainsi, cette diversité a une fonction bien précise et elle est la marque de la création. Dans une autre série de conférences, il a défendu l’idée que la diversité et l’existence commune contribuent à promouvoir la morale sociale et les vertus humaines.

Les versets ci-dessous du Coran montre l’importance de la diversité.

5:48 (…) Si Dieu l’avait voulu, il aurait fait de vous une seule communauté. Mais il a voulu vous éprouver par le don qu’il vous a fait. Cherchez à vous surpasser les uns les autres dans les bonnes actions (…).

30:22 Parmi ses Signes : la création des cieux et de la terre ; la diversité de vos idiomes et de vos couleurs. Il y a vraiment là des Signes, pour ceux qui savent.

49:13 Ô vous, les hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle. Nous vous avons constitués en peuples et en tribus pour que vous vous connaissiez entre vous. Le plus noble d’entre vous, auprès de Dieu, est le plus pieux d’entre vous.  Dieu est celui qui sait et qui est bien informé.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

3. L’Islam, le Judaïsme, le Christianisme et l’islām : vers un modèle inclusif

L’islām est le dīn d’Allah. Le Judaïsme est en principe l’islām prêché par Moïse, le Christianisme est l’islām prêché par Jésus et l’Islam est l’islām prêché par le Prophète Muḥammad à travers les révélations, ses enseignements et sa conduite. Ainsi, l’islām considérée comme dīn d’Allah se manifeste essentiellement dans les trois courants abrahamiques et en tant que tel, il englobe en son sein les vérités de ces derniers.

4. L’élitisme exclusiviste condamné dans le Coran

Les prétentions exclusivistes sur les faveurs de Dieu ou sur la guidance sont condamnées dans le Coran aussi bien à l’encontre des Juifs, des Chrétiens que des Musulmans. Au sein des religions abrahamiques, aucun courant ne peut prétendre à une guidance et à un salut exclusifs, c’est-à-dire se les approprier pour les uns ou pour les autres. 

Les versets ci-dessous du Coran montrent que toute prétention à être les seuls à avoir été guidés ou à obtenir le salut le jour de jugement est considérée comme inacceptable.

2:111 Ils ont dit : « Personne n’entrera au Paradis, s’il n’est Juif ou Chrétien ». Tel est leur souhait chimérique. Dis : « Apportez votre preuve décisive, si vous êtes véridiques ».

2:135 Ils ont dit : « Soyez Juifs, ou soyez Chrétiens, vous serez bien dirigés ». Dis : « Mais non ! Suivez la religion d’Abraham (millata ibrāhīma [6]), un vrai croyant qui n’était pas au nombre des polythéistes ».

3:24-25 C’est pour avoir dit : « Le Feu ne nous touchera que durant un temps limité » qu’ils se sont laissé égarer dans leur religion par tout ce qu’ils ont inventé. Qu’adviendra-t-il lorsque nous les réunirons un jour : nul doute n’est possible à ce sujet, chaque homme recevra alors la rétribution de ce qu’il aura accompli et personne ne sera lésé.

4:123-125 Cela ne dépend ni de vos souhaits, ni des souhaits des gens du Livre. Quiconque fait le mal sera rétribué en conséquence. Il ne trouvera, en dehors de Dieu, ni protecteur, ni défenseur. Tous les croyants, hommes et femmes, qui font le bien : voilà ceux qui entreront au Paradis. Ils ne seront pas lésés d’une pellicule de datte. Qui donc professe une meilleure religion (dīnan) que celui qui se soumet à Dieu, celui qui fait le bien, celui qui suit la religion d’Abraham (millata ibrāhīma), un vrai croyant ? Dieu a pris Abraham pour ami.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

5. Le caractère central de la relation entre le soi et Dieu

Les prophètes et les messagers font partie intégrante de ce qui est appelé dīn islām, mais ne sont pas essentiels au salut le jour de jugement. Dieu écarte la centralité de l’être que représente le Prophète Muḥammad pour le salut du croyant, de même pour l’être que représentent les prophètes et les saints qui sont inessentiels à l’accès au salut ultime. Ne sont concernés par le cheminement de cette vie que la personne qui le parcourt et sa relation avec Dieu. Chaque prophète montra l’exemple pour nourrir en soi le divin et pour ressembler à Dieu. Ils ont chacun enseigné la même essence et le processus d’acquisition des qualités divines dépendait des exigences de leur contexte respectif.

Les versets ci-dessous du Coran illustrent l’importance soulignée précédemment sur la relation entre l’individu et Dieu.

2:62 Ceux qui croient, ceux qui pratiquent le Judaïsme, ceux qui sont Chrétiens ou Sabéens, ceux qui croient en Dieu et au dernier Jour, ceux qui font le bien : voilà ceux qui trouveront leur récompense auprès de leur Seigneur. Ils n’éprouveront plus alors aucune crainte, ils ne seront pas affligés.

2:186 Je suis proche, en vérité. Quand mes serviteurs t’interrogent à mon sujet ; je réponds à l’appel de celui qui m’invoque, quand il m’a invoqué. Qu’ils répondent donc à mon appel ; qu’ils croient en moi. Peut-être qu’ils seront bien dirigés.

3:31 Dis : « Suivez-moi, si vous aimez Dieu ; Dieu vous aimera et vous pardonnera vos péchés. Dieu est celui qui pardonne, il est miséricordieux ».

33:21 Vous avez, dans le Prophète de Dieu, un bel exemple pour celui qui espère en Dieu et au Jour dernier et qui invoque souvent le nom de Dieu.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

6. Le Livre : al-kitāb al-mubīn

Le Coran répète à de nombreuses reprises le terme « Le Livre » ou al-kitāb. Les caractéristiques de al-kitāb sont : contient les détails de toutes les choses (6:59-61), est caché et seuls les purs peuvent le toucher (56:77-80), est avec Dieu (13:39), enseigné aux prophètes (2:129) et est différent des autres livres divins (3:48). Le Livre (al-kitāb) tel qu’il est mentionné dans le Coran présente des caractéristiques qui le rendent différent de ce que nous appelons communément al-qur’ān, mais il est aussi différent des autres livres divins. Qu’est-ce que al-kitāb ? C’est le livre éternel de l’existence qui est auprès de Dieu et qui recueille toutes les choses (6:59), et les faits du passé, du présent et du futur. Les écritures révélées au fil du temps sont des émanations de al-kitāb, qui est quant à lui éternel, en d’autres termes, celles-ci sont des expressions contextuelles (époque, espace géographique, langue) du Livre.

Tout comme l’islām, le Livre (al-kitāb) est transmis dans des formes d’écritures ou de révélations différentes en conformité avec le contexte dans lequel la révélation a lieu. Le caractère éternel et universel des écritures révélées ne concernent que l’essence qui est transmise par celles-ci, et non les formes qui restent contextuelles. Ainsi, le Livre n’est pas limité par une époque, une zone géographique, une langue et se trouve auprès de Dieu. En revanche, ce que nous appelons al-qur’ān, ce livre est limité par une époque, une zone géographique et une langue, et constitue une émanation du Livre (al-kitāb) qui contient toutes choses.

Les quelques versets ci-dessous du Coran marque la différence qui existe entre al-kitāb et al-qur’ān. D’autres références de versets coraniques renvoient à la description de al-kitāb : 2:129, 3:48, 39:1-2, 40:1, 41:2, 43:2-4, 44:2, 45:1, 46:2.

6:59 Il possède les clés du mystère que Lui seul connaît parfaitement. (…) Il n’y a pas un grain dans les ténèbres de la terre, ni rien de vert ou de desséché qui ne soit mentionné dans le Livre explicite (kitābin mubīnin).

10:61 (…) Quel que soit ce que tu lises du Coran (…) Il n’y a rien de plus petit ou de plus grand que cela qui ne soit inscrit dans un livre explicite (kitābin mubīnin).

13:39 Dieu efface ou confirme ce qu’il veut. La Mère du Livre (ummu l-kitābi) se trouve auprès de lui.

56:77-80 Voici, en vérité, un noble Coran (qur’ānun), contenu dans un Livre caché (kitābin maknūnin). Ceux qui sont purs peuvent seuls le toucher. C’est une Révélation (tanzīlun) du Seigneur des mondes !

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

7. Le shirk et le kufr

7.1. Qu’est-ce que le shirk ?

En théorie, le shirk signifie accorder à quelqu’un d’autre que Dieu l’autorité et la liberté d’agir. Cela signifie aussi donner plus d’importance à sa propre volonté qu’à celle de Dieu. Dans le Coran, la catégorie des mushrikīn est représentée par ces gens qui défendaient l’idée d’une seigneurie divine multiple et opposaient des rivaux et des concurrents à Dieu. Le shirk est avant tout une condition humaine qui empêche toute soumission à Dieu, et ainsi est un état impardonnable (4:116). Dans cette condition existentielle, l’être humain cherche la satisfaction et la légitimité ailleurs qu’à travers Dieu, surtout en raison de ses frustrations, ses peurs et ses anxiétés. Toutefois, ces états internes de shirk et de kufr sont des états qui demandent à être dépassés pour atteindre un monothéisme épuré.

7.2. Qu’est-ce que le kufr ?

Le kufr est un état de déni conscient de la vérité, un état de défi et d’opposition à Dieu. Les kuffār et les mushrikīn de la Mecque adoraient la « notion » de dieu et suivaient une religion à travers ces dieux qui ne représentaient en aucun cas les vertus humaines et les valeurs morales. Croire en un dieu qui cautionne l’oppression, l’exploitation et l’injustice implique une opposition à un dieu qui est tout-aimant. Les mecquois, selon toute vraisemblance, adoraient une « notion » de dieu qui encourageait l’infanticide, l’exploitation humaine et l’usure, ce qui signifie qu’ils légitimaient ces actes au nom de leurs dieux. Sous l’effet de leur opposition intentionnelle à Dieu, les kuffār avaient une réceptivité différente en ce que leur arrogance et leur méfiance les avaient privées de toute possibilité de se soumettre à Dieu (2:26, 36:10, 109:6).

Iblīs était le plus grand des kāfir, car il a fait usage de sa raison pour justifier son arrogance à ne pas se soumettre à la volonté divine et en conséquence, il s’exclut de la voie d’Allah. Aveuglé par son arrogance, il s’opposa à Allah en annonçant qu’il allait poursuivre les enfants d’Adam et les égarer de la voie droite (7:12-17).

Le kufr est un état interne de l’être qui est présent en chacun de nous. La haine, la damnation, l’arrogance, les actes immoraux etc. sont tous des symptômes du kufr qui siège dans nos cœurs. Quand l’état interne de l’être est colonisé par le kufr, cette prolifération perturbe la perception spirituelle : Il est indifférent pour eux que tu les avertisses ou que tu ne les avertisses pas, ils ne croiront pas (36:10). 

7.3. Les Gens du Livre sont-ils des mushrikīn et des kuffār ?

Les croyants qui adhèrent aux religions des Gens du Livre (ahla l-kitābi), même s’ils souscrivent à une notion inexacte de Dieu, ne peuvent être considérés comme des mushrikīn et des kuffār, car ils ne s’opposent pas à Allah. Ils adorent le même dieu (Allah) et se soumettent au même dieu (Allah) en tant que muslimūn (ceux qui suivent l’islām). Ils se remettent au Dieu de ce qui est beau et de ce qui est vertueux, et ainsi font partie intégrante du dīn islām malgré la notion inexacte de Dieu.    

8. Le pluralisme dans l’humanité

L’islām se manifeste à travers toutes les religions abrahamiques, par conséquent le salut dans l’Au-delà est accessible à travers elles (2:62). Le shirk et le kufr sont des états internes de l’être humain et peuvent être entretenus par quiconque, abstraction faite de l’appartenance religieuse. Ces états internes sont ce sur quoi l’attention doit être dirigée, car ils sont présents dans toutes les communautés humaines et les conduisent à leur propre dévastation. En avançant dans le temps, les gens se séparent de ces états miséreux pour se libérer et le dīn d’Allah prédomine sur les cœurs.

2:6-10 Quant aux incrédules : il est vraiment indifférent pour eux que tu les avertisses ou que tu ne les avertisses pas ; ils ne croient pas. Dieu a mis un sceau sur leurs cœurs (…) Leur cœur est malade : Dieu aggrave cette maladie. Un châtiment douloureux sera le prix de leur mensonge.

9:33 C’est Lui qui a envoyé son Prophète avec la direction (al-hudā) et la religion vraie (dīni l-ḥaqqi) pour la faire prévaloir sur toute autre religion (dīni kullihi), en dépit des polythéistes.

92:14-18 Je vous ai donc avertis d’un Feu qui flambe. Seul y tombera celui qui est méprisable ; celui qui crie au mensonge et qui se détourne. Mais celui qui craint Dieu en sera écarté, comme celui qui donne de son bien pour se purifier.

Traduction de Denise Masson (1967), Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

Il est à observer qu’il existe une subtilité en ce qui concerne le dīn d’Allah qui correspond à : islām (se soumettre à Dieu) – l’essence de toutes les religions monothéistes, et qui consiste à être l’ami de Dieu. À l’opposé, se soumettre à quelqu’un d’autre que Dieu signifie ici, se soumettre à son ego, à l’arrogance qui légitime les actes condamnables, et qui consiste à s’afficher comme un ennemi de Dieu.

9. Plusieurs réflexions critiques

9.1. S’éloignons-nous de Dieu ou se rapprochons-nous de Lui ?

En considérant la prémisse métaphysique sur le mouvement intra-substantiel (ḥarakāt al-jawhariyā), dont Shaykh Arif Abdul Hussain tient compte pour construire sa réflexion, l’idée selon laquelle toute chose cherche à atteindre sa propre complétude suivant un principe évolutionniste, grâce à la libération et à l’auto-réalisation, et s’approche de Dieu in fine, la question qui se pose est de savoir comment en être certain que ce mouvement conduit réellement l’humanité vers la proximité divine ? Est-ce que ce mouvement avance dans la bonne direction ? Un autre contraste métaphysique possible sur la nature de la création est qu’elle se sépare progressivement de Dieu, depuis l’acte de création jusqu’aux prophéties sur la fin des temps, que toutes les religions partagent. Ainsi, comment penser et que dire de cette réalité contemporaine anti-divine que nous observons ? Est-ce que l’humanité s’éloigne de Dieu ou bien s’agit-il plutôt d’un phénomène de rejet d’un faux-dieu par lequel elle se libérera complétement et s’approchera de Dieu, ou bien les deux conjectures sont possibles ?

Est-ce que les changements qui ont lieu au 21ème siècle dans les sociétés occidentales [7] sont bonnes (plus proche de l’essence d’une vie vertueuse et telle que prônée par les écritures divines) ou mauvaises (loin d’une vie vertueuse) ?  Est-ce qu’il y a toujours une forme de dichotomie entre ce qui est bon et ce qui est mauvais ou est-il plutôt le cas que les deux soient possibles en même temps, et si oui, comment les discriminer ?

L’éclatement de la famille nucléaire et la désintégration du rôle des sexes (m/f) constituent des thèmes majeurs du tabloïde contemporain. Ces thèmes sont aussi discutés dans le Coran, par exemple les parents sont honorés (14:41, 17:23, 31:14, 46:15-16, 71:28) et le rôle des deux sexes dans la création est déterminé (3:195, 4:124, 16:97, 33:35, 40:40, 49:13), et peuvent être considérés comme faisant partie de l’essence du texte. Est-ce que les problématiques contemporaines soulevées sur ces thèmes dans les sociétés occidentales nous rapprochent de l’auto-réalisation dans la voie divine ? Devons-nous toujours considérer les changements contextuels comme une volonté de conduire l’humanité vers la proximité divine ?

9.2. Les Lumières est-il un mouvement de rejet du faux-dieu ?

À partir de la prémisse métaphysique que Shaykh Arif Abdul Hussain postule, comment pouvons-nous montrer que la société progresse réellement, c’est-à-dire qu’elle devient meilleure et qu’elle se rapproche de Dieu ? L’un des bouleversements sociaux qu’il mentionne et qu’il considère comme une amélioration des valeurs morales humaines est l’adoption de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Pourtant, à y regarder de plus près, cette amélioration et bien d’autres reposent sur l’idéologie de la négation divine. En effet, la plupart des idées modernes telles que la liberté, le progrès, l’égalité, la démocratie, le gouvernement constitutionnel, le recours aux données scientifiques ou encore la séparation de l’Église et de l’État, sont des sous-produits du siècle des Lumières. Il a été nommé « Lumières », car ses pères appelaient à faire usage de la raison seule en tant que moyen pour établir la loi, le gouvernement et même la morale. Faire l’usage de la faculté humaine de la raison devait libérer les êtres humains des superstitions et de la religion pour leur permettre d’accéder à la vérité objective.

L’un des héritages majeurs des Lumières est le développement de l’humanisme laïque qui considère que les êtres humains sont capables de prôner la moralité et le développement de soi, sans nécessairement croire en Dieu. Le second leg est la notion de progrès qui signifie que les conséquences naturelles de l’évolution socioculturelle est l’amélioration de la condition humaine. En tant que croyants, nous devons réfléchir de manière critique à la notion moderne de « progrès » et chercher à déterminer le genre de progrès qui a réellement été accompli depuis quelques siècles.  Quel serait l’enjeu de prolonger la vie, d’aller sur la Lune ou encore de réaliser des innovations technologiques si ce progrès est accompli en révoquant la raison d’être de la religion et même de la vie elle-même, pour se rapprocher de Dieu ?

Nous pourrions toutefois affirmer que le dieu qui fut rejeté par les Lumières était un faux-dieu, représenté par les institutions de l’Église qui avaient enchaîné la liberté de pensée, mis en place une application inégale de la taxation, répandu l’injustice. Rejeter ce faux-dieu pourrait être considéré comme une libération en soi, telle que nous le retrouvons dans la première partie de la shahādā, c’est-à-dire : il n’y a de dieu. Cependant, il apparaît que le bébé fut jeté avec l’eau du bain et que le concept de dieu, au sens formaliste, a définitivement disparu du discours et pire, devenant une relique indésirable. Comment pouvons-nous considérer que ces progrès (philosophiques, scientifiques et sociologiques), même si séduisants d’un point de vue matérialiste, soient en train de rapprocher l’humanité de Dieu, alors qu’ils reposent sur le rejet de Dieu, fondamentalement ? Ou bien, serait-il le cas que le rejet de dieu en Occident soit en réalité un signe du rejet d’un faux-dieu, et que le rejet et la contestation de son existence soit le seul moyen pour se libérer des chaînes de l’esprit pour qu’enfin la voie de la vraie spiritualité et d’une morale authentique s’ouvre à nous ? [8]         

9.3. L’Homme, une autorité morale autonome ?

Les Droits de l’Homme considérés dans son paradigme et contexte occidental est centré sur l’individu au lieu d’être centré autour de Dieu. Leur mise en place, à la suite du mouvement des Lumières, habilite l’être humain à être la seule autorité à pouvoir déterminer le bien et le mal. Malgré les origines théophobes [9] de la notion de Droits de l’Homme, y compris les notions de liberté, d’autonomie, d’égalité et de progrès, nous vivons dans un monde où elles sont implémentées à très grande échelle et nous tirons bénéfice de leur application en tant qu’elles constituent les fondements des modèles de nos vies et de notre être en tant que produit de l’aire laïque occidentale. En étant conscients de leurs origines, comment interagissons-nous avec ces « améliorations » sociales et idéologiques ? En d’autres termes, comment mettrons-nous en perspective ces améliorations par rapport à la raison d’être de la religion, c’est-à-dire de faciliter la transformation de l’âme humaine dans sa recherche de la proximité divine, l’ultime étape ?

En Occident, les notions de Droits de l’Homme, de démocratie, de liberté, d’autonomie, d’égalité et de progrès sont le résultat de l’abandon de la part des Lumières de ce qui fut considéré la Loi de Dieu. Devrions-nous nous attendre à une chaîne de pensées infidèles en adoptant ces notions en tant que croyants, les cautionnant et même les sanctifiant ? Ou bien est-il le cas que notre compréhension du divin est si restrictive que nous avons du mal à percevoir cette délivrance du faux-dieu mise à notre portée à travers ces concepts des Lumières comme une étape nécessaire pour trouver le vrai-dieu ?               

9.4. Qu’est-ce que l’intelligence collective ?

Shaykh Arif Abdul Hussain mentionne à plusieurs reprises l’expression « intelligence collective », une structure qui accompagnera la communauté humaine dans la reformulation des règles relatives à la forme en fonction du contexte changeant en continu. Il est utile de soulever quelques réflexions sur cette expression qu’est celle de l’intelligence collective.

Dans un exemple que Shaykh Arif Abdul Hussain fournit pour expliquer ce qu’il entend par « intelligence collective », il interroge sur l’avenir qui est réservé au thésard après sa thèse de doctorat ? Normalement, il ou elle contribuera à faire progresser la recherche. Ainsi, dit-il, que l’humanité a atteint à notre époque un certain niveau dans le domaine de la morale, si bien que les individus sont en mesure de prendre en main les rênes de leur destin et de trouver leur chemin de manière autonome en suivant l’essence des écritures divines, mais aussi l’essence des règles relatives au culte et aux interactions humaines. À partir de là, une question s’impose : comment garantir que cette notion d’autonomie individuelle et d’indépendance de toute autorité religieuse (ici, prophète/imām) ne nous mènera pas à l’adoption des philosophies centrées sur l’être humain, lesquelles rejettent les hiérarchies métaphysiques et remplacent Dieu par les Hommes au point culminant de l’existence, et à ce titre leur accordant l’habilitation à agir selon leur propre volonté ?

Le concept d’intelligence collective cherche à établir une forme de collectivité et de coopération entre les croyants. Le discours populaire n’est certes pas une solution fiable pour reformuler les règles et le Coran exprime des doutes dues à son caractère instable (5:103, 6:111, 6:119, 7:102, 10:36, 10:103, 21:24, 23:70-71, 25:44, 34:24, 41:3-4). Cependant, la coopération entre intellectuels, les enquêteurs de terrain, les juristes pour déduire des règles relatives au contexte contemporain semble être une option sûre, surtout si elle réunit les experts en lois islamiques et les experts des domaines profanes.  

9.5. La question de l’ijtihād

L’ijtihād est le processus de déduction des règles à partir de deux sources, le Coran et la Sunnā, dans les circonstances changeantes du temps. Pour les chi’ites duodécimains, l’ijtihād est non seulement autorisé, mais nécessaire à la survie et à la pertinence des lois islamiques. Est-ce que les savants contemporains dans leur pratique de l’ijtihād cherchent à résoudre les nouveaux défis liés au caractère évolutif du contexte ? Qu’est-ce qui aujourd’hui dans la pratique de l’ijtihād ne permet pas de voir l’essence de la religion se refléter dans les règles déduites ? Est-ce que ce problème d’essence négligée est récurrent dans tout le monde musulman ou bien est-il spécifique à une zone géographique particulière ?    

9.6. Deux critiques chi’ites du pluralisme religieux : Rizvi et Mutahhari

Dans son livre Islam and Religious Pluralism, Sayyid Muhammad Rizvi examine certains des versets cités précédemment (2:135-137, 2:285, 3:19-20, 3:83-85) qui mentionne le terme islām et soutient qu’il est identique au terme Islam, c’est-à-dire la religion formelle de ceux qui ont adhéré au message du Prophète Muḥammad. Pour défendre cette position, il cite l’Ayatollah Morteza Mutahhari [10] qui dit : « Si quelqu’un prétendait que la signification du terme islām dans ce verset n’est pas notre religion en particulier, et que l’intention dans le sens littéral du mot serait la soumission à Dieu, la réponse à cette présomption serait de dire qu’il ne fait aucun doute que islām signifie se soumettre et la religion Islam est la religion de la soumission. Ainsi, la réalité de la soumission a une forme particulière à chaque âge. À notre époque, sa forme est cette même belle religion apportée par le Sceau des Prophètes. Il s’ensuit que le mot islām s’applique nécessairement à cette religion. » Il fonde sa croyance dans l’idée qu’il n’y a qu’une seule vraie religion à chaque âge et qu’il est obligatoire à tout un chacun d’y croire intégralement dans son message.

Sayyid Muhammad Rizvi soumet l’interrogation suivante à ses lecteurs : si le Judaïsme et le Christianisme étaient des religions valides à l’époque du Prophète Muḥammad pourquoi a-t-il sans cesse essayé de les inviter à la foi musulmane ? Il cite pour cela l’exemple des lettres prophétiques envoyées aux différents rois qui gouvernaient les régions peuplées des Gens du Livre, dans lesquelles il les invitait à l’accepter comme messager et à se soumettre à l’Islam.

10. Les étapes suivantes à envisager

  • Le 21ème siècle et le 7ème siècle de l’Arabie sont des contextes bien différents. Est-ce que cette différence contextuelle appelle à une reformulation des règles coraniques sur les interactions humaines dans leurs formes pour qu’elles soient alignées à l’essence de la parole divine ? Quelles sont ces règles coraniques qui ne reflètent plus l’essence dans le contexte du 21ème siècle ?
  • Qui et quelle structure est responsable de la reformulation de ces règles ? Que signifie l’expression « intelligence collective » ? Quelles sont les thèmes qui nécessitent une reformulation et comment répondre à ces problématiques ? Comment examiner et évaluer de manière critique les rites et les rituels non-obligatoires en les mesurant à l’aune du Coran, ainsi que les effets attendus sur l’âme de l’individu et de la communauté ? Comment ces effets attendus peuvent-ils être accessibles ?
  • Que signifie vivre une vie centrée autour de Dieu au 21ème siècle et que signifie chercher la proximité de Dieu ?
  • En considérant l’amplitude des pratiques islamiques actuelles qui rappellent Dieu (ḍikr, l’art, la poésie, l’architecture etc.), comment peuvent-elles être associées à nos vies modernes pour favoriser l’omniprésence divine ?
  • Dans la continuité de la réflexion critique sur l’ijtihād, il est nécessaire que soient évaluées les opinions des différents sources d’imitation (marja`) relatives aux règles qui ne semblent pas s’accorder avec l’essence du Coran pour pouvoir mesurer l’étendue des possibilités. À cet égard, il est important de connaître et d’évaluer les raisons qui poussent la World Federation of KSIMC [11] à choisir certains savants au détriment d’autres et une discussion doit être menée sur les critères désirés chez un marja` pour devenir une source d’imitation. Que signifie « être le plus savant » pour une source d’imitation (marja`)? Est-ce que le critère pour déterminer celui qui est le plus savant tient compte de la connaissance du contexte dans lequel les imitateurs évoluent, et par conséquent la connaissance de leurs besoins ? Est-ce que la notion de « le plus savant » peut être différente d’une zone géographique à une autre ?

[1] Un concept métaphysique qui a été discuté et élaboré par Mollā Sadrā Shīrazī dans son Al-Asfār.

[2] Résumé des conférences données par Shaykh Arif Abdul Hussain pendant le mois de Muharram 2018/1440, suivi d’une série de réflexions critiques et les étapes suivantes à envisager. Les pages suivantes présentent un résumé des éléments essentiels abordés au cours de la série de conférences donnée par Shaykh Arif Abdul Hussain au cours du mois de Muharram 2018/1440, organisées par l’Organization of Islamic Learning (OIL) de Toronto, ON. Le résumé et les explications suivants sont proposés par l’OIL pour que les participants puissent s’y référer, confronter leurs compréhensions et perceptions des idées présentées au cours des conférences et les prolonger par des discussions critiques. Ce résumé (celui en anglais) a été lu et approuvé par Shaykh Arif Abdul Hussain et considéré conforme au contenu de ses conférences. 

[3] Il existe une différence fondamentale entre islām (i minuscule) et Islam (i majuscule). Le premier renvoie à la soumission à Dieu et le second terme à la religion formelle de ceux qui ont adhéré au message du Prophète Muḥammad. Pour plus de détails, le lecteur peut consulter Abdul Hussain, A. (2018). Islam et Théocentricité, Tome 1 : Bases théologiques pour la libération de l’Homme.   

[4] Le Coran ne prescrit aucune forme de peine capitale ou de mort et les récits sur la lapidation sont catégorisés comme faibles ou faiblement transmis. 

[5] Abdul Hussain, A. (2015). Re-interpretation of Islamic Laws based on Time and Space.

[6] Au sens du dīn islām.

[7] NDT : dans le texte en anglais, il est fait mention de l’espace public canadien.

[8] Le lecteur pourra visualiser la série de conférences intitulée Discovering God Through Yourself, récitée au cours de Muharram 1440 (2018) à Londres. 

[9] Alasdair McIntyre, philosophe écossais, soutient que les Lumières rejetaient activement la théologie et la morale religieuse, mais n’ont pas réussi à construire une structure morale indépendante, et ont fini par élaborer des justifications rationnelles et profanes des croyances religieuses, d’où l’utilisation du terme « athées » ne semble pas judicieux ici.  

[10] Le lecteur pourra également consulter le Chapitre 9 du livre La Justice Divine consacré aux bonnes œuvres des non-musulmans.

[11] Organisation mondiale des chi’ites duodécimains d’origine indienne.


Références bibliographiques

Abdul Hussain, A. (2015). Re-interpretation of Islamic Laws based on Time and Space. Al-Mahdi Institute. Birmigham.

Abdul Hussain, A. (2018). Islam et Théocentricité, Tome 1 : Bases théologiques pour la libération de l’Homme. Éditions Avicenne. Antananarivo, Madagascar.

MacIntyre, A. (1981). After Virtue. London: Gerald Duckworth & Co.

Masson, D. (1967). Le Coran. Bibliothèque de la Pléiade. Belgique.

Mutahhari, M. (2007). La Justice Divine. Éditions Albouraq. Beyrouth, Liban.

Rizvi, M. (2004). Islam and Religious Pluralism. The Islamic Publishing House. Ontario, Canada.

Autres liens

http://shaykharif.com/work/transcripts/reinterpretation/

https://editionsavicenne.wordpress.com/2021/02/05/example-post-3/

https://youtu.be/Vvvw-d2QlIA?list=PLRcPfyWiWk8mhZeuhlkwUkawCQPdvYHnC

https://www.al-islam.org/islam-and-religious-pluralism-ayatullah-murtadha-mutahhari/


Biographie de l’auteur

Shaykh Arif Abdul Hussain est un intellectuel musulman et fondateur de l’Institut al-Mahdi (1993) où il occupe le poste de maître de conférences. Après avoir complété sa formation initiale en études islamiques au Madrassa imam al-Khoei à Londres, il poursuivit des études à un niveau plus avancé dans les séminaires religieux en Iran où il assista aux cours d’éminents savants de Qom et Najaf. Après son retour au Royaume-Uni vers le milieu des années 90, il continua ses études en droit théorique musulman et en philosophie auprès de son éminence l’Ayatollah Ḥusayn al-Amīnī. Il a un certificat d’Ijtihad attribué par l’Ayatollah Sayed Muhaqqiq Damad.

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